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W. E. RETANA

ger: cela pourrait vous faire un mauvais jeu; on tâchera de vous tromper en imaginant mille pièges et difficilement les étrangers y échappent. Ne vous adressez point aux sergents de ville pour apprendre quelque chose; c'est une peine inutile, ce sont des mots perdus: ils vous répondront tranquillement qu'ils ne le savent, qu'ils viennent d'entrer hier au service; mais vous les pressez en donnant quelques explications dans l'espoir de vous servir de leurs connaissances, ils vous donneront un labyrinthe qu'eux mêmes ne comprennent non plus.

La plus belle chose de Madrid c'est la bourgeoisie; elle est aimable, distinguée, illustrée, franche, digne, hospitalière, et chevaleresque. Elle est aussi un peu aristocratique dans ses goûts; elle aime les rois, les titres, les dignités, tout en restant républicaine; elle se moque des curés, des prêtres; elle ne pratique pas beaucoup, mais elle est toujours catholique, a en horreur les protestants, les juifs et les librepenseurs. Elle est toujours fière de l'histoire de son pays, elle le croit le meilleur qui existe au monde; mais aussitôt qu'elle entend parler de quelque crime ou faute commisse par ses compatriotes, elle se met à crier: voilà ! nous sommes encore des sauvages, nous sommes des vandales, nous avons encore du sang africain, etc.

Le vrai madrilène disparaît de jour en jour; il n'en reste que le bas peuple, la canaille qui est la boue, la fange de Madrid. Toutes les fois que je pense à cette société, je m'imagine le bas peuple comme un fumier, la bourgeoisie comme la fleur qui croît sur le terrain enfumé. L'aristocratie se divise en deux classes: la vieille et la nouvelle. La vieille est encore un peu fière, mais c'est une fierté d'écume: elle disparaît aussitôt qu'on y touche. La nouvelle c'est le terme moyen conduisant de la bourgeoisie à la vieille aristocratie: il est bien difficile d'en définir les limites: elle est aimable, quelque fois un peu ridicule pour se donner les apparences qu'elle n'a pas et pour prétendre cacher la nouveauté de ses écussons, forgés avant hier.

Le climat de Madrid est horrible; on ne sait pas au matin s'il fera froid ou chaud à midi; le Guadarrama, qui est à la côté, y envoie un vent qui cause beaucoup de pneumonies. Les maisons sont mal bâties, le plancher est en briques; on trouve une ou deux cheminées dans la maison, ce qui fait grelotter en hiver et prendre des rhumatismes. Heureusement, on passe la vie dans les cafés et restaurants, où l'on parle de politique, de taureaux, on discute, on dispute, on crie, on rit, on se bat sans être sûr des motifs ou des causes des divergences d'opinion. Il y a encore beaucoup à dire de Madrid, mais je n'ai plus le temps d'en parler.» [Heidelberg, 1886.]

La crónica, por llamarla así, á pesar de su carácter intimo, es