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RETRATOS DE MUJERES 505

Dans ce mal d'habitude, on se remit a vivre;

La nature est ainsi: jusque sous les boulets,

Pour peu que cela dure, on rouvre ses volets;

On cause, on s'évertue, et l'oubli vient en aide;

Le marchand á faux poids vend, et le plaideur plaide; La coquette sourit. Chez le barbier du coin,

Un Francais, un Gascon (la graine en va tres loin),

Moi j'aimais a m'asseoir, guettant chaque figure: Moliére ainsi souvent observa la nature.

Un matin, le barbier me dit d'un air joyeux: “Monsieur, le bonne affaire! (et sur les beaux cheveux D'une enfant lá présente et sur sa brune téte

Il étendait la main en facon de conquéte),

Pour dix frances tout cela! la mére me les vend. —Quoi? dis-je en portugais, la pitié m'émouvant, Quoi? dis-je á cette mére empressée á conclure, Vous venez vendre ainsi la plus belle parure

De votre enfant; c'est mal. Le gain vous tente: eh! bien Je vous l'achéte double, et pour n'en couper rien. Mais il faut m'amener l'enfant chaque semaine: Chaque fois un a-compte, et la somme est certaine.” Qui fut sot? mon barbier. 11 sourit d'un air fin, Croyant avojr surpris quelque profond dessein.

La mere fut exacte á la chose entendue:

Elle amenait lenfant, et je payais á vue.

Puis, lorsqu'elle eut compris que pour motif secret Je r'avais, apres tout, qu'un honnéte intérét,

Elle me Penvoya seule; et l'enfant timide

Entrait, me regardait de son grand ceil humide, Puis sortait emportant la piece dans sa main,

A force toutefois de savoir le chemin,

Elle s'apprivoisa: — comme un oiseau volage Que le premier automne a privé du feuillage, Et qui, timidement laissant les vastes bois,